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Durant la Grande Guerre, les services d’espionnage des deux camps ont eu à vaincre d’abord les réticences des états-majors. Avant d’être considérés comme indispensables.
Jour d’hiver 1916 à Chantilly. Jour de guerre. A l’hôtel du Grand Condé où Joffre, commandant en chef des armées, a installé son QG, c’est l’habituelle atmosphère de fourmilière en alerte, la bousculade des uniformes… 450 officiers, 800 hommes de troupe et secrétaires s’activent dans cette immense bâtisse au style monumental. Sans compter les visiteurs, nombreux, parmi lesquels on compte aujourd’hui un «combattant de l’ombre» : le commandant Georges Ladoux, responsable du contre-espionnage français, dont la haute silhouette inquiète se faufile au long des couloirs. L’homme a dans sa serviette des rapports alarmants. Les antennes de renseignement de Belfort et de la Suisse font état – et ce n’est pas la première fois – de concentrations de troupes ennemies au nord et à l’est de Verdun. Tout laisse penser qu’une offensive de première grandeur se prépare contre la ville où les Français, avec insouciance, allègent leurs défenses depuis l’été.
Ladoux doit voir un camarade de promotion, un colonel attaché à l’état-major. Il compte sur lui pour influencer directement Joffre, le pousser à agir… Mais comme il l’écrira dans ses Souvenirs (parus en 1937, aux éditions de France), c’est une douche glacée qui l’attend. A peine retrouve-t-il son ami, sur un palier d’étage bondé transformé en antichambre, qu’il apprend que Joffre ne veut rien entendre. «Il n’y croit pas, lui explique le colonel. Laissez tomber cette histoire-là… Vos tuyaux vont droit au panier.»
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